Finis terrae


RÉSUMÉ

Bruxelles, 1615. En plein coeur des prairies marécageuses bordant la Senne, Jérôme de Meester esquisse le tracé de la future rue Neuve.

Finis Terrae s’inspire de l’histoire des habitants du dernier témoin de cette époque, une maison quatre fois centenaire, classée, bordant l’artère devenue aujourd’hui la plus commerçante de la ville.

Capitale d’un «état-tampon» séparant les puissances ennemies, terre de passage où se croisent des armées errantes en quête de solde, des colporteurs, des comédiens et des peintres, des voyageurs et des émigrés de toutes les nations, Bruxelles, sous le régime espagnol, est convoitée, bombardée, ruinée, reconstruite. Les hommes y défendent âprement leurs privilèges, vénèrent les saints et se méfient de la religion, haïssent la France et copient Versailles, parlent en français, chantent en flamand, se saoulent avec philosophie et rêvent d’une société plus juste. Bruxelles, au XVIIe siècle, se cherche déjà une identité.





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Karoo

Pour Karoo, Thibault Scohier part à la découverte de la sélection 2016-2017 du prix des Lycéens de littérature : voici Finis Terræ de Nathalie Stalmans.

Finis Terræ raconte l’histoire de la rue Neuve de Bruxelles, de son fondateur et de ses descendants. C’est, derrière ce prétexte, une manière pour Nathalie Stalmans de présenter cette région qui n’était pas encore la Belgique, et de suivre les bouleversements qui la secouent au cœur du sanglant XVIIe siècle.

En effet, ce territoire compris entre les Provinces-Unies (les actuels Pays-Bas) et la France s’est trouvé au centre de bien des conflits militaires. L’ouvrage s’ouvre sur l’exécution d’une hérétique anabaptiste, dernier soubresaut bruxellois des guerres de religions…


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FIRST:époque siècle histoire guerre - "Finis terrae"
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Aquam

Bernard ANTOINE , Aquam , Murmure des soirs, 2022, 466 p., 22 € , ISBN : 978-2-93065-782-0 Bernard Antoine , l’auteur…

Le temps des coquelicots

Sous ce nom de plume, Pierre-Marie Dumont-Saint Martin, musicien confirmé, revisite la guerre de 14-18 avec une fiction romanesque certes, mais largement guidée par l’Histoire – une de ses passions – et par des souvenirs et des témoignages rapportés au sein de sa propre famille. Récit d’aventures et d’initiation, porté par les jeunes épaules de Gérard Vandervelde, musicien lui aussi, et déjà flûtiste de talent, engagé à dix-sept ans par l’orchestre symphonique de Liège (sa ville natale tout comme celle de l’auteur). On est en 1914. La guerre va se charger de maculer la partition et Gérard la découvre de la façon la plus horrible qui soit en assistant, lors d’une rencontre fortuite avec les premiers envahisseurs, à la torture et à l’exécution de Marcel Kerff, gloire du cyclisme belge, avec lequel il cheminait joyeusement à moto. Plus tard, lors des massacres de Namur et Dinant, c’est Richard, son meilleur ami, qui est abattu avant que ne disparaisse aussi Elise, la sœur de Richard, dont il était épris. C’est sur ce préalable calamiteux que s’amorcent l’errance solitaire et les tribulations du jeune civil à travers ce conflit mondial qu’il vit sous le signe de l’audace mais aussi de l’amitié. À commencer par celle quasi fusionnelle qui le lie à Donner, un superbe étalon de race, transfuge des lignes allemandes où il était maltraité, et qui restera tout au long de la guerre son fidèle complice. Au point de jouer avec lui au football et de faire de son cavalier un as de la voltige. Ce que Gérard deviendra aussi en plein ciel grâce aux enseignements et à l’amitié tendrement amoureuse de la célèbre et très réelle Hélène Dutrieu, première aviatrice belge, championne de cyclisme, couverte de récompenses internationales dans les deux disciplines et, durant ce temps de guerre, directrice des ambulances, notamment au Val de Grâce. Et voilà comment Gérard Vandervelde deviendra un des plus redoutables pilotes de combat, multipliant les victoires sur les adversaires allemands (dont le meilleur qui, après l’affrontement, deviendra son ami et jouera un rôle important dans son avenir). Le seul regret de cette terreur du ciel reste de n’avoir pu descendre Manfred von Richthofen, le fameux «  baron rouge  », vu qu’à cette époque  le travail avait déjà été fait par un collègue…Et c’est bien un des paradoxes de ce récit que de voir ce jeune homme déjà aussi talentueux en musique qu’en cyclisme ou en équitation,  vivre des événements souvent atroces et périlleux tout en courant de réussite en réussite sur le plan personnel. À l’exception, majeure il est vrai, de ses premières amours contrariées à plusieurs reprises par le sort. Même si la fin s’éclaire d’une possible lumière à l’enseigne musicale d’un nocturne de Field.Cela dit, la pluralité de P.M. Dumont-Saint Martin n’est pas en reste dans ce livre où romantisme, réalisme et Histoire, portés par une écriture efficace, s’accompagnent d’une technicité parfois proche de la minutie. Qu’il s’agisse des stratégies mises en place de part et d’autre, des faits de guerre proprement dits, de musique et d’instruments folkloriques, de sport équestre, de praxis sexuelle ou d’aviation (avec, entre autres, des pages quasi didactiques sur l’apprentissage du pilotage ou de l’art de l’esquive lors des affrontements aériens).D’autre part, dans une annexe au récit, l’auteur prend position sur le rôle qu’aurait joué l’intransigeance des Alliés (Traité de Versailles) dans les origines de la Seconde Guerre. Selon lui, et contrairement au propos de nombreux historiens, il ne s’agirait en rien d’un désir de vengeance, mais de la logique  d’une orientation politique déjà bien installée dès le XIXe siècle : ce pangermanisme encore et toujours relayé par les bellicistes des hauts commandements.Quant aux irruptions de personnages réels dans le roman, – politesse de l’auteur – elles sont avalisées in fine par des notices détaillées sur « ce qu’ils sont devenus ».…

Bientôt la Convention des cannibales

Daniel Fano est un écrivain de l’apocalypse tranquille. Au fil des années, dans des récits aux titres improbables, des poèmes narratifs et subtils, des fables et des romans de la mélancolie lucide, l’auteur a inventorié, grâce à son sens aigu de la fiction, la modernité et ses avatars, qu’on pourrait appeler aujourd’hui tout simplement le temps d’après . Que ce soit dans les vertiges de la Guerre froide, la Société du spectacle des émotions et des catastrophes, les guerres et coups d’état de série B, Daniel Fano puise sa matière féroce et froide pour faire remonter à notre entendement le chaos et l’entremêlement de nos  perceptions qui a pour nom encore… mémoire. Dans une langue débarrassée de toute afféterie, scrupuleuse, l’auteur court-circuite les effets de réel en les surjouant. Dans le montage apparemment aveugle du film d’une époque, la nôtre,Monsieur Typhus, « héros » récurrent de nombreux textes et livres,  est une forme d’Ulysse revenant au pays natal, celui de  la fausse innocence de toute génération, pour mettre à nu les péripéties de son odyssée désarticulée, composite, carnassière. La violence, dans un crépitement permanent sur nos écrans, glisse lentement dans le domaine des events , ces petits moments susceptibles de relancer sous une forme plus aiguë encore, le Marché des choses et des êtres. Ces êtres, désarticulés dans des émotions et des sexualités de marchandise, sont les protagonistes du roman noir, du récit d’espionnage qui font de l’homme vivant une matière transformable dans le champ de la Bourse internationale des images. Lire aussi : un extrait de  Bientôt la Convention des cannibales Fano connaît l’Histoire, celles hommes, des idées, des stratégies et l’écriture est encore une des formes les plus subtiles pour enfermer dans les réseaux du texte, le filet de la fiction, ces pantalonnades annoncées comme tragiques et qui ne font qu’effacer l’homme vivant de l’image pour en faire une  figure de récit médiatique en boucle internationale. Bientôt la Convention des cannibales annonce le programme. Nous sommes dans un roman kaléidoscopique qui mêle guerres, génocides, assassinats et tutti quanti  depuis les années 1970 jusqu’au aujourd’hui. Le tout s’agite dans une sorte de carnaval des vampires que certains nomment l’Histoire. Une écriture joyeuse, délurée, chargée d’humour jusqu’à la détente, Fano prend soin d’extraire du récit le salmigondis émotionnel que l’on retrouve en boucle dans tous les réseaux et une partie de la presse. Ces personnages sont interchangeables, changent de nom, de sexe, de corps, d’identité…On découvre, page après page, comment, à la vitesse du Marché, nous allons du souvenir de l’humanisme à l’avènement planétaire du transhumanisme. Il y a un air de Fritz Lang qui, un des premiers, dans ses films des années 1930 en Allemagne ( Docteur Mabuse …), avait révélé et mis en scène la dimension criminelle et délirante du nazisme. Le complot, le mensonge à l’égal de la vérité, l’imperturbable dissolution de la mémoire européenne dans le populisme et l’effroi d’un monde qui vient sont les nouvelles formes de cette hystérie de la criminalité, comme une façon d’être au monde et de le penser.Franck Venaille, disparu récemment, avait publié de nombreux livres sur ce sujet, intime et collectif, La guerre d’Algérie (Minuit, 1978), L’homme en guerre (Renaissance du livre, 2000)… La génération des guerres coloniales avait déjà vu un monde fracassé par la violence des idéologies renouvelées.Fano reprend, depuis des lustres, ce travail en faisant des biopsies narratives dans chaque moment de la convulsion de notre temps. C’est en cela qu’il est un des écrivains majeurs de notre littérature, discret, presqu’anonyme pour beaucoup, bien que ses publications marquent, depuis un demi-siècle, le temps littéraire des avant-gardes au temps de la décomposition.Vif, intelligent, burlesque même, sous la couverture aux allures de pulp fiction de Jean-François Octave, Bientôt la Convention des cannibales équivaut à la lecture d’un monde qui se retrouve comme le loup des dessins animés, lequel, courant plus vite que son ombre, dépasse le bord de la falaise, et reste là, suspendu, conscient, terriblement conscient jusqu’au «  Ho, ho…  » fatal avant la chute finale, les yeux exorbités. Daniel Simon Monsieur Typhus, toujours fournisseur d’horreur et de terreur. Rita Remington, par instants entièrement tatouée. Patricia Bartok, sourire de vampire. Jennifer Style, endormie sur un tas de diamants. Rosetta Stone, pas que sa main poudrée de cocaïne. Et même Jimmy Ravel voit des espions partout. De 1970 à 2018, ils sont à Bogota, Colombo, Dubaï, Nairobi, Pékin, Tirana, Tunis, Varsovie, Vienne. Ils courent les complots, se font truffer de plomb, tremper dans l’acide, chiffonner à point. Non content de passer les clichés du roman d’espionnage à la moulinette, l’auteur entraîne ses personnages…